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7 mars 2015 6 07 /03 /mars /2015 22:21

II naquit entre 1077 et 1083 en Iran à Niff, une petite ville de la province du Djilan, au sud-ouest de la mer Caspienne. Il fut le pôle (Qutb) de son temps et occupe une place centrale dans l'histoire du soufisme.

Son père et son grand-père maternel étaient descendants de 'Alî b. Abî Talib, le très fameux gendre du Prophète. Sa mère avait déjà soixante ans à sa naissance. Il vit le jour en mois de rarnadân en 470H/1077. Les circonstances qui précédèrent sa naissance lui valurent plus tard le surnom de « faucon gris des cieux ». Sa mère, Fâtima portait au visage la cicatrice d'une ancienne blessure qui remontait à bien avant son union avec son mari. Bien qu'elle en eut tenu secrète les circonstances, son fils les lui révéla : alors que, seule, elle était allée puiser de l'eau à une source, un misérable avait voulu l'abuser. I1 allait triompher, lorsque du ciel fondit sur lui un faucon gris, qui lui arracha les deux yeux, la délivrant ainsi. La jeune femme s'était evanoui et, pour lui faire reprendre conscience, le faucon lui avait effleuré la joue de sa griffe, d'où la marque qu'elle portait. Stupéfaite, la mère voulut savoir comment il avait eu connaissance de ces faits qu'elle n'avait racontés à personne et il lui révéla alors que, le faucon, c'etait lui.

Très tôt, il vit des êtres spirituels que son entourage ne pouvait percevoir. Lorsqu'il eut l'âge de fréquenter l'école, il vit à plusieurs reprises ces êtres l'accompagner. À dix-sept ans, il fut transporté de Niff au mont 'Arafat où il vit des milliers et des milliers de pèlerins marchant en procession compacte. Sa vision achevée, il supplia sa mère de le laisser partir pour Bagdad, afin de pouvoir s'instruire dans une école de droit et fréquenter les saints personnages réputés de cette époque. À Bagdad, il fit des études de droit hanbalite. Mais ses maigres ressources épuisées, il fut contraint de rechercher sur les bords du Tigre et dans la campagne environnante des déchets de légumes et de salades laissés par les cultivateurs et de dormir dans les ruines de Madaïne. Ses états spirituels se prolongeaient parfois durant de longues heures et lui occasionnaient des évanouissements et des défaillances. Une fois, il plongea dans un état de léthargie si prolongé qu'on le crut mort et qu'on fit procéder aux soins mortuaires et seul remuement de paupières lui évita d'être enterré.

Déçu par les fastes et les dérives de la vie citadine, il décida de quitter Bagdad mais ne put en franchir les portes. A chaque fois qu'il s'y essaya, il fut terrassé par un choc violent jusqu'à ce qu'il comprenne l'ordre qui lui était adressé, à savoir qu'il devait y demeurer « pour préparer une œuvre dont les hommes plus tard lui sauraient gré ».

Reprenant ses études de droit, il prit pour maître dans la voie Hammâd al-Dabbas et dut subir les épreuves les plus diverses sans perdre de sa vénération pour son guide. Il entreprit une retraite de vingt-cinq années dans le désert Irakien, quand la même voix qui lui avait enjoint de demeurer à Bagdad lui commanda d'y revenir et d'y prêcher, encouragé en cela par le Prophète lui-même. Il obéit et acquit rapidement la réputation de très grand savant doublé de maître vénéré. Son auditoire augmenta bientôt à un tel point qu'il dut se déplacer vers la place publique. Le peuple pouvait rester jusqu'à la nuit pour l'entendre. Même des califes vinrent lui rendre visite et lui témoigner leur respect en dépit du peu de crédit que 'Abd al-Qâdir accordait aux hommes de pouvoir. Une école fut construite qui accueillait chaque année trois mille étudiants et que 'Abd al-Qâdir lui-même instruisait. Si bien qu'en quarante années, il enseigna à plus de cent vingt mille élèves. On le surnomma Muhyî al-dîn, le « vivificateur de la religion ».

Ce n'est que vers les toutes dernières années de sa vie que 'Abd al-Qâdir ressentit les atteintes de l'âge et se vit contraint de restreindre l'ardente activité à laquelle il était accoutumé. Alors, dans ses moments de lassitude, le grand saint exprima le souhait d'« une mort à laquelle ne serait pas soumise la vie et d'une vie à laquelle ne serait plus nécessaire la mort». Il mourut en 561H/1165.

Son influence dépassa les frontières de l'Irak dès avant son décès. Cependant, il ne fonda pas de voie de son vivant. Il avait prévu la succession de l'école religieuse (madrasa) qu'il dirigeait depuis la dis­parition de son professeur. Ces fils en firent rapidement une zawiya à laquelle ils associèrent l'école ainsi qu'une mosquée et le mausolée du shaykh. La Qadîriyya ne se répandra véritablement qu'à partir du XVe siècle et parviendra à s'implanter dans des pays comme l'Inde, le Turkestan, l'Arabie, l'Egypte, l'Afrique du Nord et certains pays de l'ex-Union soviétique. Plusieurs traités nous sont parvenus de lui, tous riches en enseignements et extrêmement précieux, parmi lesquels on mentionnera al-Fath al-rabbânî et le Futûh al-ghayb.

Il écrivit les vers suivants :

« O toi qui recherches par ignorance

Les paradis, ses houris et ses anges,

C'est la Vision sacrée qu'il te faut désirer.

Quant à nous, en amoureux obstinés,

Nous voulons vivre éternellement fixés

Dans le sillage des pas de notre Bien-Aimé. »

Tiré du livre Femmes soufies, Sulamî. Notices biographiques par Jean Annestay

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