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27 décembre 2014 6 27 /12 /décembre /2014 21:56

 

   Plus d'un délégué a mentionné durant ce congrès que l'Islam embrasse la totalité de la vie, ce que nul ne met en doute. Mais ce qui se passe en fait aujourd'hui dans plusieurs, sinon dans la plupart, des pays islamiques, c'est que la vie embrasse l'Islam – mais « embrasse » n'est pas le terme exact, car c'est d'une mainmise qu'il s'agit plutôt que d'un embrassement ! La vie bannit la religion en la reléguant dans un petit coin, et en l'étouffant de plus en plus au point qu'elle puisse à peine respirer.

   Et quel est le remède ?

   En guise de réponse à cette question, rappelons-nous certains aspects extérieurs de notre civilisation – j'entends la civilisation islamique – aspects dont la fonction était, et peut être à nouveau, de jouer le rôle de coquille protectrice pour le noyau, c'est-à-dire pour la religion elle-même. L'étoffe de notre civilisation est tissée de l'exemple donnée par notre Prophète ; et particulièrement significatif à cet égard est le fait que sa maison était un prolongement de sa mosquée. C'est ainsi que pour douze cents ans – et davantage dans maints pays islamiques – les maisons de son peuple furent les prolongements des mosquées. Le Musulman enlevait ses chaussures quand il entrait dans sa maison, tout comme il les enlevait quand il entrait dans la mosquée ; il s'asseyait dans sa maison de la même manière qu'il s'asseyait dans la mosquée ; et il décorait les murs d'ornements pareils à ceux qu'il voyait aux murs de la mosquée ; et il n'aurait pas davantage placé dans sa maison des ornements non conformes à une mosquée. Il était donc constamment entouré de rappels de la dignité et des responsabilités spirituelles de l'homme, et il se vêtait selon les mêmes principes. Ses vêtements correspondaient à la dignité de la fonction de l'homme en tant que représentant de Dieu sur terre ; ils lui permettaient en même temps de faire aisément les ablutions, et ils étaient en parfaite conformité avec les mouvements de la prière. Qui plus est, ils étaient un ornement pour cette prière, à la différence des habits européens modernes qui privent les mouvements de la prière de toute leur beauté et les gênent, tout comme ils font fonction de barrière entre le corps et les ablutions.

   Tout ce dont je j'ai fait mention est extérieur, mais les actes extérieurs influent sur l'intérieur, et les vêtements d'un homme, de même que sa maison, sont les choses les plus proches de son âme, et leur influence sur celle-ci est continuelle, et par conséquent d'une puissance incalculable. Il ne peut faire de doute que ces objets extérieurs furent l'un des secrets de la profondeur de la piété chez les Musulmans durant douze cents ans ; et cela nous ramène à la parole que l'Islam embrasse la totalité de la vie. Grâce aux aspects extérieurs de la civilisation islamique, la totalité de la vie était en fait pénétrée par la religion, et je ne vois pas d'autre remède à notre présente crise religieuse qu'un retour à cette noble civilisation dont la fonction est de créer un cadre digne de l'esprit de la religion, un cadre qui rend relativement facile l'accomplissement de nos obligations rituelles. Or la communauté ne peut pas non plus se dispenser de l'aide de tout ce qui facilite la vie spirituelle, car l'homme a été créé faible. Mais ce retour ne peut être réalisé que par la mise en œuvre d'exemples à grande échelle.

   Arabes, vous êtes dans la maison de l'Islam, et après votre indépendance vous êtes libres d'y faire ce que vous voulez ; nous vous regardons du dehors de cette demeure, et nous plaçons nos espoirs en vous. Ne nous décevez pas.

 

Martin Lings, Retour à l'esprit, p. 106-112

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